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Marketing Digital

Interview de Gregory Pouy, consultant indépendant fondateur de La Mercatique

Les entreprises se sont-elles appropriées le nouveau sujet du digital ?

Cette problématique est encore largement considérée comme un métier à part entière, et beaucoup d’entreprises ont créé ces dernières années leurs directions digitales. Pourtant, à mon sens, le digital n’est qu’un outil. Un outil indispensable et incontournable pour tous les services : marketing, communication, RH, informatique… J’aime bien faire l’analogie entre le digital et les stylos : il y a des stylos partout dans l’entreprise, tout le monde doit savoir s’en servir et pourtant, il n’y pas de Direction du Stylo !
Nous sommes encore dans une phase d’évangélisation. Ces directions digitales sont nécessaires dans un premier temps uniquement, pour l’acculturation de l’entreprise, mais à terme, il ne devrait plus y en avoir. Par exemple, Renault a lancé sa Digital Factory il y a deux ans pour justement injecter le digital dans toute l’entreprise et pour son Directeur Marketing, sa mission est claire, il considère que son pari sera gagné lorsque son poste n’existera plus !

Quelles sont les bonnes questions à se poser en matière digitale ?

Les bonnes questions se sont les questions de base, celles qui renvoie aux fondamentaux du marketing. De nombreux marketeurs se sont rués sur les applications mobiles. Mais finalement, on s’aperçoit que 90% des applis sont téléchargées moins de 1000 fois, c’est-à-dire qu’elles ne servent pas ! Les marketeurs, avant de céder aux phénomènes de mode, devraient pouvoir se mettre à la place du consommateur et se demander de quelles applications ils ont réellement envie et besoin. Idem pour les pages Facebook des marques, on peut d’abord s’interroger : en tant que consommateur, à combien de pages de marques suis-je abonné ? Cela peut paraître très basique mais ce bon sens permet de prendre les décisions justes et d’investir intelligemment. En mettant les marketeurs face à leurs choix et parfois à leurs incohérences, le digital fait revenir à ce qu’est l’essence de la marque : à quoi sert ma marque ? Si elle disparaît, que se passe-t-il ? Quelle est ma promesse marque ? Quelle place j’accorde à mes clients ?

Y a-t-il encore des logiques on et off line ?

Non, ce serait une énorme erreur de le penser tout simplement parce que cette question de l’intégration des canaux, elle est réglée depuis longtemps par le consommateur lui-même ! Si vous lisez vos mails sur votre mobile, ça vous paraît logique qu’en arrivant au bureau, ils n’apparaissent plus comme « nouveaux messages » dans votre boîte Outlook. J’aime bien la notion de friction c’est-à-dire tout ce qui créé de l’inconfort pour le client, et je pense que les ponts en on et offline doivent justement gommer un maximum de ces frictions. Le drive en est un bon exemple ou le flashcode qui permet de vérifier les avis sur un produit quand on est en magasin.
La vraie question que doivent se poser les entreprises et les médias, c’est plutôt d’optimiser les utilisations suivant les contextes dans lesquels on est. On a besoin d’accéder à l’info essentielle quand on est en lecture sur un mobile, tandis qu’en naviguant depuis un ordinateur ou un iPad, on a plus de temps et donc de disponibilité.

Comment les entreprises doivent-elles s’y prendre pour rester à la pointe de l’innovation ?

Pour bien appréhender le digital, il faut à la fois être curieux et avoir une capacité de résilience, c’est-à-dire accepter que le changement est permanent. On le sait, tout va très vite et il est impossible de tout suivre. Le Directeur digital doit donc pouvoir s’entourer et se reposer une équipe d’experts aux connaissances très pointues, problématique par problématique. A partir du moment où il comprend les grandes lignes, parle le même langage que ces experts, connait globalement les outils, il est capable de driver son équipe.
Même s’il touche à des sujets très opérationnels, le digital nécessite de prendre de la hauteur car il bouleverse les modèles classiques. On ne peut pas dupliquer sur le digital les modèles anciens, sinon, on prend le risque de mettre des carrés dans des ronds et évidemment, ça ne fonctionnera pas. Ce sont ceux qui sauront s’adapter au changement qui survivront. Yahoo en est un très bon exemple. A son arrivée il y a un an demi, la marque avait perdu de son attractivité tant pour l’audience que pour les salariés. A peine nommée, elle a pris des positions très fortes et complètement réorienté la stratégie de la marque. Cela semble lui réussir puisque Yahoo commence à redorer son blason.

Les agences de communication traditionnelles sont-elles bien placées pour accompagner les annonceurs sur ces sujets digitaux ?

Étonnamment, le fait est que les annonceurs ont tendance à s’approprier plus vite les enjeux digitaux que les agences. Cela peut paraître paradoxal mais le digital nécessite pour les agences une totale remise en question, tant de leur business models, de leur organisation, de leur approche technologique etc.  La mutation digitale demande beaucoup plus d’efforts aux agences traditionnelles qu’aux annonceurs. Le simple fait de travailler de manière intégrée avec une diversité de profils techniques et créatifs pose problème. Il faut aussi avouer les problèmes d’égos de certains qui considèrent encore le média TV beaucoup plus noble que le web même si on leur prouve clairement que le digital est un média plus efficace sur certaines campagnes.

Peut-on parfois parler de freins liés à la résistance au changement ?

C’est clairement une problématique aujourd’hui dans nombre d’entreprises. D’un côté, certaines prônent un discours très orienté sur le digital mais dans la réalité ne s’en donnent pas toujours les moyens.  De l’autre, il y a les marketeurs eux-mêmes qui n’ont pas toujours forcément envie de changer et de prendre trop de risques. Cela s’explique aussi par une vision de plus en plus court-termiste : les entreprises doivent rassurer les actionnaires avec de bons résultats immédiats, quant aux professionnels, ils ne sont plus autant fidèles à leur employeur et utilisent chaque expérience pour faire briller leur CV avant de passer à autre chose.
Le résultat, c’est que l’on voit des industries traditionnelles se faire disrupter par des pure-players. Par exemple, le modèle des « box » qui proposent chaque mois aux femmes de tester de nouveaux produits de beauté aurait dû être inventé par Séphora, Nocibé ou Marrionaud mais ce sont finalement des startups qui ont sorti le concept et rencontré le succès. La raison est simplement que les acteurs traditionnels avancent timidement sur le digital, ils y vont parfois sans y croire vraiment mais sous la pression du phénomène digital.

>> A lire sur le même sujet :
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