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Data Marketing

IA et Transmarketing 8ème interview | Rencontre avec Laurent Ach

L’intelligence artificielle est en train de bouleverser le travail des marketeurs. Chez Rakuten, le machine learning a été déployé à grande échelle pour améliorer ses services et en proposer de nouveaux, tout en optimisant les budgets et la transformation économique. A la croisée du business, de la science et du développement technique, Laurent Ach, Manager du Rakuten Institute of Technology Paris, fait le point sur la recherche en Intelligence Artificielle au sein du groupe Rakuten, ses applications business et la collaboration entre les scientifiques et les équipes marketing.

Laurent Ach

Le pitch

Bertrand Espitalier : Bonjour Laurent, vous êtes manager du Rakuten Institute of Technology Paris et expert en machine learning. Vous travaillez en étroite collaboration avec les équipes business et marketing de Rakuten en France et dans le monde. Pouvez-vous nous présenter le Rakuten Institute of Technology ?

Laurent Ach : Rakuten Institute of Technology (RIT) est le département de recherche du groupe japonais Rakuten avec des équipes à Tokyo, Paris, Singapour, Boston, San Mateo, Bangalore, au total 150 chercheurs et ingénieurs. Nous travaillons sur des projets de recherche appliquée, en machine learning, deep learning et sur les interactions immersives. Des équipes de Tokyo travaillent aussi sur des applications robotiques.

B.E. : Quelles sont ses spécificités en tant qu’institut privé ?

L.A. : La mission du RIT est d’exploiter les résultats de la recherche scientifique et les technologies les plus avancés pour améliorer les services de Rakuten ou en inventer de nouveaux pour les activités du groupe dans les domaines E-commerce, fintech, communication, contenus numériques. Certains projets répondent à des demandes urgentes d’équipes techniques ou business mais nous proposons aussi des innovations à partir de la connaissance que nous avons des métiers de Rakuten et des tendances technologiques. Nous sommes aussi amenés à faire évoluer des technologies existantes et certains projets sont plus orientés vers la recherche. Notre approche repose en général sur le développement de prototypes qui passent des phases de tests et sont mis en production quand les résultats sont positifs. Nous nous situons donc à la croisée du business, de la science, et du développement technique.

B.E. : Quels liens avez-vous avec la recherche fondamentale en intelligence artificielle et les organisations publiques ?

L.A. : Il existe plusieurs collaborations du RIT avec des universités et des partenaires privés, dans le cadre de contrats à long terme ou à l’occasion de projets particuliers par exemple avec le MIT aux États-Unis et l’université de Tsukuba au Japon. En France, nous proposons des data challenges que certains étudiants utilisent pour leur thèse de Master à l’École Normale Supérieure.

la transformation liée à l’intelligence artificielle

B.E. : Comment l’Intelligence Artificielle est-elle perçue par les équipes de Rakuten ? Rencontrez-vous des difficultés pour faire accepter l’IA chez Rakuten ? Quelle méthodologie avait vous mis en place pour accompagner le changement ?

L.A. : Le RIT aide les équipes de Rakuten à utiliser du machine learning partout où c’est utile mais d’autres équipes de Rakuten travaillent aussi sur des composants à base de machine learning qui sont déployés depuis longtemps en production comme par exemple, les systèmes de recommandation et de recherche de produits. Il s’agit pour nous de déterminer quels sont les processus qui n’utilisent pas encore de machine learning et pourraient en bénéficier. Nous essayons par exemple de comprendre le travail des équipes marketing ou du service client et, en fonction de notre analyse et des discussions que nous avons avec les experts de ces équipes, nous démarrons des projets. Nous essayons d’acquérir progressivement une bonne connaissance de leur métier et d’avoir des échanges sur la manière d’optimiser ou d’améliorer leurs tâches ou de réduire leurs coûts. Nous avons au RIT des personnes chargées spécifiquement de la relation avec les équipes business et de la coordination des projets, ce qui facilite les échanges et permet de systématiser notre approche.

B.E.Êtes-vous dans une phase exploratoire de l’IA ou dans une mise en œuvre à grande échelle ? Quels sont les meilleurs cas d’usage de l’IA dans le marketing et l’expérience client ? Quels sont les résultats obtenus ?

L.A. : Le machine learning est déployé à très grande échelle chez Rakuten dans de nombreux services. Dans le domaine du marketing digital, le machine learning est omniprésent dès qu’on passe par des plateformes publicitaires par exemple. Mais il reste beaucoup de tâches qu’on peut continuer à améliorer par du machine learning, comme la gestion des campagnes marketing, le traitement des messages clients, l’enrichissement du catalogue produit. Les meilleurs cas d’usages sont ceux où on a déjà atteint un certain degré d’automatisation ou d’optimisation et où on peut bénéficier de l’expérience acquise pour systématiser et généraliser l’optimisation par du machine learning. Chez Rakuten France, on peut citer la cas des attributs structurés dont on a besoin pour enrichir la base de données produits (marque, taille, couleur, forme, …) : ils étaient générés à travers des règles écrites à la main et accumulées au cours des années pour extraire du texte brut les informations utiles. Ces règles sont maintenant complétées ou remplacées par des systèmes à base d’apprentissage et de traitement du langage naturel et on exploite en plus les images associées aux produits avec du deep learning.

Transmarketing

B.E. : Quel est l’impact de l’IA sur la pratique du marketing ? Comment l’IA et le professionnel du Marketing se complètent-ils ? Qu’est-ce qu’un bon marketeur à l’heure de l’IA ?

L.A. : Nous sommes à une période où il y a une grande volonté d’optimiser les investissements marketing et d’améliorer les taux de conversion et les équipes marketing sont très inventives à ce sujet. Les règles d’optimisation que les équipes avaient mise en place ont souvent permis d’améliorer la rentabilité des investissements mais elles comportent une part d’intuition et doivent être mise à jour régulièrement. Par des méthodes à base d’apprentissage, on évite de concevoir les règles au cas par cas et on peut gagner un ordre grandeur dans l’optimisation. Nous ne déployons pas le machine learning de manière générique ni en repartant de zéro. L’expérience des équipes marketing est fondamentale et il nous faut bien la comprendre pour mettre en place une optimisation plus avancée, ce qui implique qu’une excellente collaboration s’établisse avec les data scientists. Les bons marketeurs ne doivent pas nécessairement avoir de grandes connaissances en data science mais ils doivent comprendre que c’est un apport utile pour aller plus loin dans l’amélioration du business et être en mesure de dialoguer avec des data scientists. C’est vrai dans les deux sens : les data scientists doivent comprendre ce que peut leur apporter l’expérience des équipes marketing et être capable de dialoguer avec elles.

Marketeurs & Data Scientists

B.E. : Quel est le profil des équipes data qui travaillent avec les marketeurs ?

L.A. :  Les data scientists que nous recherchons pour travailler avec les équipes marketing doivent avoir une excellente compréhension théorique du machine learning pour être en mesure de choisir l’approche technique en adéquation avec le problème posé et de faire évoluer les techniques quand c’est nécessaire. Mais il doivent d’abord comprendre quel est le problème posé et cela nécessite de bien communiquer avec des spécialistes du marketing dont le langage, les outils et les habitudes de travail sont différentes des leurs. Ils doivent ensuite être capables de s’aligner avec les manières de travailler côté business pour livrer des prototypes qui soient testables et susceptibles d’être déployés en production.

B.E.: Comment les équipes marketing & les équipes data collaborent-elles au quotidien ?

L.A. :  Les data scientists et les équipes marketing se rencontrent régulièrement à tous les stades du projet, de la formalisation du problème jusqu’aux A/B tests et au déploiement. Il est compliqué de formaliser le problème initial car certains éléments qui paraissent évidents pour une équipe peuvent être inconnus de l’autre. La manière d’envisager les tests est, elle aussi souvent différente car les data scientists veulent des évaluations scientifiques de leurs résultats pour être en mesure de les améliorer alors que le marketing veut bénéficier du travail réalisé au plus vite et avec de nombreuses contraintes extérieures. La communication est importante à chaque étape et le travail nécessite des efforts des deux côtés. Il faut un peu de temps pour qu’une bonne collaboration s’établisse mais lorsqu’on y parvient c’est souvent travail commun à long terme avec un grand bénéfice mutuel.

CONSEIL

B.E. Quel conseil d’ami donneriez-vous aux dirigeants d’entreprises qui s’interrogent sur l’internalisation d’un laboratoire d’IA ?

L.A. :  Pour une entreprise qui a la taille suffisante, internaliser un laboratoire d’IA permet d’établir des relations à long terme entre des data scientists et les autres équipes business ou techniques. Par la compréhension mutuelle qui peut ainsi se développer, il est possible d’aller assez loin dans l’optimisation ou l’automatisation des processes qui sont historiquement gérés de manière un peu artisanale ou bien à travers des solutions commerciales génériques. Pour les entreprises qui n’ont pas les moyens de créer en interne une équipe de data scientists, il existe de nombreuses solutions commerciales et plusieurs grandes plateformes permettant de faire du machine learning mais dans tous les cas, il est nécessaire que les équipes business acquièrent une compréhension des principes des systèmes à base d’apprentissage et de ce qu’ils peuvent leur apporter.

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